Tourner en rond n’est pas l’activité que je préfère le plus au monde. Mais l’équipe de chasse a été constituée sans moi aujourd’hui et tout le monde est occupé à s’activer dans la grotte. Je fais tournoyer un bout de bois entre mes doigts, tandis que mes pas me dirigent d’eux-mêmes vers l’extérieur. Retrouvant les rayons du soleil, je plisse les yeux quelques secondes, le temps de m’accoutumer à cette nouvelle luminosité. Que vais-je bien pouvoir faire aujourd’hui ? Heisuke est introuvable et Soo est certainement parti en chasse. Je soupire, faisant peu attention à l’endroit où me mène mes pas. Des grottes, je traversais la grande gare routière et au loin, je voyais une immensité désertique. Je me dirigeais donc vers le Sud. A partir de là, je fis plus attention à ce qui m’entourait, prenant soin de ne pas marcher complètement à découvert. Il me semblait bien comprendre que la cachette de la Main Rouge se situait vers cette zone. Je fis donc le moins de bruit possible, mais pris tout de même soin d’aiguiser un bous de bois suffisamment épais pour me défendre. Le coin ne me rassurait pas vraiment, mais je n’avais pas envie de rebrousser chemin. Et puis maintenant que j’étais partie, j’avais une petite idée de l’endroit où je voudrais aller. L’ennui ? Je n’avais prévenu personne. En rentrant, je me ferais certainement sermonner par le boss … Comme si cela n’était pas devenu une habitude.

Je me stoppais une fois arrivée devant une immense bâtisse. Aussi haut que ce que l’homme pouvait construire, aussi imposant qu’il était possible de faire, se dressait devant moi l’immense centre commercial abandonné. Autrefois l’un des lieux privilégiés de notre race, il faisait désormais peine à voir. Plusieurs vitres cassés, le vent y soufflait de façon continue sans pour autant arriver à le faire bouger. Je pris soin de ne pas lâcher mon bâton, car s’il est abandonné par les hommes c’est pour une bonne raison … Je grimpe les marches des escalators, déambulant dans les rayons, à la recherche de vêtements. Tant qu’à faire, autant me trouver une belle robe, ou bien un jean. Mon fétiche commençait à s’user. Passant devant le rayon des jouet, mon oeil fut attiré par un objet en particulier. Je m’approche, persuadée qu’il ne fonctionne déjà plus. Mais il est toujours dans sa boîte, comme s’il attendait son propriétaire. Amusée, je le déballe et le pose d’abord sur l’étagère. Je l’observe, le retourne, avant de m’intéresser à la manivelle. Je prends bien garde à l’actionner jusqu’au bout avant de le relâcher et quand mes doigts quitte le morceau de plastique, la boite s’ouvre et libère un son musical. J’adore la musique, c’est ce qui me manque le plus ici. Et je souris, reconnaissant l’air classique qui en ressort. Fredonnant à mon tour, je le prends et main et continue mon périple dans le centre commercial, jusqu’au rayon "mode féminine". Même si je fais désormais encore plus attention aux bruits alentours, je fredonne un peu plus fort, tournant sur moi-même, attrapant une longue robe bleu nuit. Ah si le temps pouvait s’arrêter là.

Sortir seule ? Oui ça t'arrivait de le faire parfois, mais cela restait plutôt rare. En tant qu'infirmière, tu ne possédais pas une arme qu'on pouvait qualifier de forte. Juste un petit couteau de front, utilisable pour des attaques au corps à corps, ce qui n'était pas très pratique contre plusieurs créatures. Par exemple, face à une goule, une attaque corps à corps étaient bien trop dangereuses avec les risques de morsures. C'est pourquoi la meilleure option était donc de fuir, même si fuir n'était pas la marque de fabrique de la Main rouge. Mais si tu voulais survivre tu n'avais pas le choix, à moins d'être rusée pour tuer d'une autre manière ses créatures. Aujourd'hui, tu avais décidé de faire cavalier seule. Un choix peut-être un peu trop téméraire de ta part, surtout pour l'endroit où tu souhaitais mettre les pieds… Le centre commercial, cet endroit regorgeant de goules, ces créatures que tu ne supportais pas, car elle te faisait rappeler ton père. Toute façon où il n'y avait pas de goules ou autres créatures mutées ? Chaque endroit avait son lot de créatures, tout était une question de chance, chose que tu n'avais pas spécialement. Toute manière qui à la main rouge en avait réellement au vu des nombreuses fois où tu les soignais.

Même si tu étais déjà allée avec Saya, il y a plusieurs semaines chercher de nouveaux vêtements, tu avais encore envie de faire une quête de vêtement et peut-être d'autre chose s'il y avait quelque chose d'intéressant. Tu marchas prudemment, à l'affût de tout ce qu'il t'entourait. Tu n'avais encore croisé la route d'aucune créature, mais tu ne préférais pas penser que tu étais tranquille. Être trop sûr de soi pouvait courir à ta perte et tu le savais. Au fur et à mesure que tu avançais, une mélodie fredonnée attira ton attention. Qui était-ce ? En tout cas, cette personne à ton goût était irréfléchie, car une telle musique pouvait attirer les créatures qui avaient élu domicile en ses lieux. Tu regardas à travers la vitrine brisée, tu ne voyais rien, mais tu entendais bien une mélodie fredonnée. Tout en restant sur tes gardes, prêt à attraper ton couteau de front ranger dans son étui sur ton avant-bras s'il le fallait. Tout en avançant, tes yeux se posèrent sur cette demoiselle qui tournoyait avec sa robe bleue dans les mains, sa longue chevelure suivant le mouvement. Elle était belle, mais insouciante à ton goût. Insouciante de ne pas faire plus attention que ça à ce qu'il l'entourait. Tu continuas à avancer et le seul mot qui sortit entre tes lèvres fût ce mot : « Idiote. » Un mot loin d'être flatteur que tu avais prononcé assez fort pour qu'elle entende, mais assez bas pour ne pas attirer l'attention d'une goule traînant dans le coin.

Oui elle était idiote à tes yeux. Idiote de ne pas penser aufaite que son fredonnement pouvait attirer de l'attention. Tu la détaillas de bas en haut, elle était un peu près de ta taille, mais son physique était différent du tien… Elle était plus jolie que toi. Une vraie bombasse à vrai dire qu'elle serait sûrement capable de te complexer si tu étais du genre à te dévaloriser, ce qui n'était pas le cas. « Tu n'as pas peur d'ameuter les goules ici ? » Ou même pire. Après tout , il n'y avait pas que les goules qui traînaient par ici…

L’endroit est d’un ennui mortel. Il n’y a aucun bruit. Cela ne m’empêche pas de rester vigilante. On ne sait jamais. Je repose la robe, farfouille un peu plus pour dénicher ce que je suis venue chercher. La boite à musique émet toujours un son, mais elle arrive bientôt à la fin et la manivelle finit par s’arrêter. C’est là qu’un bruit, imperceptible, titille mon oreille. Je ne discerne pas l’endroit exact d’où il émane, mais il ne me semble pas si éloigné. Une présence peut-être. On dirait un bruit de pas. Mais il semble tellement feutré, précautionneux, que je doute qu’il s’agisse d’une goule. Mon arme accrochée en bandoulière est à proximité de ma main. Je peux facilement m’en saisir ; je l’ai attachée de telle sorte à ce qu’elle soit facile d’accès. C’est quand je perçois plus distinctement une voix, des mots, que je me redresse. Une femme se tient à quelques mètres. En me redressant, des cheveux me tombent sur le visage, que je dégage d’un mouvement leste. De prime abord, elle semble inoffensive. Elle est moins grande, élancée, son visage ne semble pas menaçant, malgré son ton dur. Plus important encore, elle n’avait pas d’arme à feu. Mais j’avais appris avec le temps à me méfier des apparences. En l’examinant toujours, je vis une marque sur sa main et ma main se posa d’elle-même sur mon arme, sans l’empoigner. J’avais raison de me méfier. Mon visage se durcit, mes jambes légèrement pliées se préparer à attaquer à tout moment. « Peur ? Je me moquais, étirant mes lèvres en un sourire. Si j’avais aussi peur, je ne serais pas venue. Tout simplement. » Mais j’étais venue armée. J’avais laissé l’arc qui me servait à chasser, mais je savais me servir de l’arme qui pesait sur mon dos. Je la sentais de plus en plus, s’alourdissant sur mon corps. Mais je ne fis rien pour m’en délaisser. Les yeux fixés sur elle, je fis un mouvement sur le côté, prudemment, comme un chat sauvage que l’on perturbe dans son milieu. Ma main retomba le long de mon corps. Je plisse les yeux, toujours méfiante. L’inconnue devient soudain menaçante et j’hésite encore à attaquer la première. « Que fait un membre de la Main Rouge, toute seule ? … Et sans armes. »

Tu l'observais danser tout en attrapant des vêtements qui n'avaient pas encore été emportés. Tu avanças d'un pas lent et précautionneux. Tu te fichais pas mal en soit qu'elle découvre ta présence, mais tu préférais rester prudente surtout que tu étais de la Main Rouge. Ce clan que peu de monde appréciait. Tu la regardas et finalement tu lui indiquas ta présente par un reproche en la traitant d'idiote. Tu t'étais arrêtée à une certaine distance, la détaillant du regard de bas en haut et surtout de l'arme feu qu'elle portait. Puis tu la regardas à nouveau droit dans les yeux en lui faisant remarquer que sa musique pourrait attirer les goules ou même bien d'autres créatures. Elle marqua un point que tu ne pus rétorquer. Effectivement si elle avait peur, elle ne serait pas venue, comme toi. Seule, en solitaire.

Elle bougea, mais toi tu pivotas juste légèrement et continua à la suivre de tes prunelles sombres tout en restant sur la défensive. Tu eus un petit sourire en coin contenant ton envie de rire. « Qui te dit que je ne suis pas armée ? » Certes ton arme était petite, peut-être même faible, mais avec agilité même l'arme la plus insignifiante pouvait être aussi redoutable. Ta belle lame que tu affûtais quand elle ne tranchait plus aussi bien à ton goût semblait bien cachée contrairement à celle de la jeune femme. Si elle n'avait pas une bonne vue pour la voir, en tout cas elle l'avait eu pour voir cette marque sur le dos de ta main signant ton appartenance à la Main Rouge. Cette marque qu'on t'avait faite à tes seize, après avoir réussi les tests de confiance. Ce marquage qui t'avait brûlé la peau à jamais et dont tu n'avais guère honte, ne cherchant pas à le masquer.

« En ce qui concerne ce que je fais là, je ne pense pas à avoir te le dire. Et comme pour si je suis armée, qui te dit que je suis seule et que je ne suis pas venu avec mes confrères. » Tout comme toi, tu ne pouvais pas évincer la possibilité qu'elle soit seule malgré ses précédentes paroles. « Faire des suppositions et s'y fier est dangereux.  » Tes yeux se posèrent sur son arme afin de réussir à l'identifier. Tu avais déjà vu un truc du genre que ton frère avait récupéré lors d'une excursion à la recherche de matériel, mais sur le coup ça ne te revenait pas. En tout cas une chose est sûre, il s'agissait d'une arme pouvant être utilisé à distance, contrairement à la tienne qui obligeait des attaques corps à corps. Réellement, tu n'avais aucune chance, à moins d'user de ruse. « Si tu as peur que je t'attaque, détends-toi... Je n'ai guère envie d'attirer les créatures ici. » Tu n'en avais pas peur, mais si tu pouvais éviter de les croiser ça t'arrangeait bien, car face à une goule tu devais te montrer encore plus prudente puisque tu ne pouvais qu'attaquer de front et non à bout portant.