Bâtiment 1

Comme attendu certainement, Minjae partagea mon intérêt pour cette jolie flamme ensorcelante qui n’obtenait pas tant de grâce aux yeux de Tôma. Je laissais mon cadet me rejoindre, satisfaite d’entendre son accord et je lui répondis à propos de l’objet de notre curiosité commune : « C’est un feu follet, » lui soufflais-je comme s’il ne fallait pas que la flammèche m’entende révéler sa nature. Je ne doutais pas de ma conclusion. Cette étrange flamme correspondait parfaitement à mes lectures. Je ne savais si Minjae en avait déjà entendu parler. Un petit sourire malicieux se nicha au coin de mes lèvres. Une étincelle dans le regard, j’ajoutais sur le ton du mystère. « Mais qui sait si cela ne correspond pas à la manifestation d’un esprit égaré sur terre ? »  Ma vivacité se ravivait. Mon aura plus lumineuse m’emplissait à nouveau, comme si j’en oubliais où je me trouvais. Vers notre ainé, je m’en retournais et m’exclamais : « Deux contre un, d’accord ou pas, on y va Tôma ! » Je lui souriais, fière et assurée comme il m’était accoutumé avant que je revienne, plus que l’ombre de moi-même. Notre « gardien » pourrait toujours manifester sa désapprobation, une fois que Minjae et moi étions d’accord au moins pour une chose, il serait difficile pour ne pas dire impossible de nous y empêcher. De nouveau, mon attention je reportais sur notre guide. Amusée, exaltée par la douceur mystérieuse et grisante de cette situation, je me laissais emporter par la liesse du jeu. À l’esprit supposé, je m’adressais avec légèreté : « Où nous emmènes-tu petite flamme ? Qui es-tu… » Ma voix s’éteignit alors que ma gorge se noua. Le poids de la mémoire retomba aussitôt sur mes épaules. Voile flou devant mes yeux, les traits de la silhouette danse s’estompèrent. Je me rappelais tous ces visages que nous avions pu croiser. Tous ceux qui n’ont pu être sauvé. Tous les morts qui sont restés ici… Mais pourtant, un petit pincement encore plus douloureux me serra le coeur. Si ce feu était un guide… Je gardais gravé en moi le souvenir de cette main fantôme venue guider la mienne sur les touches du clavier que mes doigts découvraient pour la première fois. Et le doute qui en était né en moi. L’effroyable doute de son trépas…


Après m’être quelques instants figée, ma marche je reprenais, silencieuse, petits poings serrés, en direction de ce bâtiment vers lequel la flammèche semblait avoir voulue nous mener.

Groupe A: Kobayashi Tôma, Park Yeonwoo, Yu Min Jae

Après quelques instants à vous guider, cette flamme qui saura attiser votre curiosité aura finalement disparue devant vos yeux. L’instant de votre rencontre fut bref bien qu’il fallait l’avouer, ce genre de manifestation durait généralement beaucoup moins de temps. A présent, seule la structure à votre gauche était visible, ce bâtiment que vous sembliez vouloir visiter à défaut du précédent.

Facile à ouvrir, la porte vous révèlera ce qui semblait être une ancienne salle de travail. Plusieurs armoires jonchaient les murs et de tous les livres présents dans celui-ci, nul n’aura survécu à l’incendie qui avait ravagé les lieux. Peut-être parviendrez-vous à ouvrir et déchiffrer malgré tout quelques annotations si vous plongiez le nez dedans ? Face à la porte se tenait un grand bureau parfaitement rangé. Doté de plusieurs tiroirs, il ne semblait pas être en si mauvais état, l’épaisseur devait avoir joué sur sa stabilité. La pièce était étonnement surchargée d’armoires remplies à ras bord, à l’exception d’un petit renfoncement derrière la porte ouverte qui reposait contre un coin de meuble. A croire que ce lieu était timide et souhaitait se cacher dans l’obscurité. Mais saurez-vous le dénicher ?

Bâtiment 1

Tôma ne se gêna pas d'abandonner un soupir en voyant que ses deux compagnons semblaient s'être ligués contre lui pour rejoindre cette flamme dansante dans l'obscurité. Le soldat grogna et ne put que les rejoindre, à moitié à contre-coeur, ne sachant pas réellement ce qui pouvait se cacher dans cette lueur bleuté. Des mots qui sortirent de la bouche de Yeonwoo, il songea à ce qu'était un "feu follet", et surtout au fait qu'il était loin d'y croire. Pour lui, cela ne ressemblait à rien qu'il n'avait déjà vu en partant en expédition, mais, après tout, toute cette escapade dans le hangar était relativement étrange dès le départ. Silencieux alors, le jeune homme resta à quelques mètres des plus jeunes, guettant leurs arrières au cas où un quelconque danger surgissait sans crier gare. Comme tout le monde, Tôma avait subi des pertes dans son entourage, mais il ne croyait pas au surnaturel. Tout avait forcément une explication logique et plausible à l'instar des récentes disparitions dont on avait appris le triste dénouement.
Tout à coup, la marche se ralentit, la flamme disparut. Le plus âgé se permit de relâcher un peu sa garde, revenant auprès de ses interlocuteurs encore plus curieux et imprudents que lui ne pouvait parfois l'être. Yeonwoo paraissait perturbée, mais cela ne l'empêcha pas de s'engager dans le bâtiment qui se présentait désormais à eux. Aussitôt, Tôma en fit de même, découvrant l'étendue des dégâts supplémentaires qui séjournaient dans cet endroit peu accueillant. Ce qui ressemblait à une bibliothèque ne possédait plus aucuns livres, tous brûlés à leurs pieds et quand le soldat voulut en saisir un, il tomba en poussière entre ses doigts. Le Japonais s'avança alors dans la seconde pièce, étrangement en meilleure état et commença à ouvrir les différents tiroirs du bureau avant que son attention ne soit hapée par autre chose.

« Derrière la porte, venez voir », fit-il signe à ses compagnons.

Bâtiment 1

À l’instar de mon souffle coupé, la flamme s’en était allée. Reflet de lueur ravivé pour ensuite faner dans mes yeux, notre guide disparut. Le bâtiment lui ne semblait plus attendre que notre venue. Quels secrets avait-il à nous dévoiler autres que sa déchéance à l’état de cendre ? Mon coeur déjà endeuillé au milieu des décombres attisants de douloureux souvenirs passés, ne fit qu’être éprouver davantage, scandalisée à la vue de ces lives abandonnés au brasier par ces cinglés ! Ce fut la première fois je crois, qu’une telle formulation à leur égard s’imposa d’elle-même dans mes pensées. Ces instruments de savoir et de connaissances, comment avaient-ils les détruire ? Certes, ils avaient sans pitié exterminé bon nombres d’êtres humains alors pourquoi des bouquins ? Mais si on leur concédait la cause humanitaire, ces ouvrages étaient-ils atteint du choléra ? Leur nombre les rendaient-ils trop encombrants à déplacer ? Je me doutais que s’il y eut parmi eux un exemplaire d’importance, ces individus l’auraient emporté avec eux. Mon instinct pensait avant tout à de la documentation pouvant porter sur le sujet de la médecine, mais peut-être me trompais-je ? À ma curiosité, je ne résistais néanmoins et à l’instar de Toma dont je connaissais le gout de la lecture proche du mien, entre mes doigts, je me saisissais d’un de ses résidus de livre. Celui-ci se désintégra également, cependant, je persévérais. Avec d’infinies précautions, j’entrepris de feuilleter un par un les ouvrages en apparence les moins touchés, jusqu’à ce que l’un d’eux accepte de me révéler quelques lignes de son contenu sans fondre entre mes doigts. Il me fallut approcher mon visage de plus près pour essayer de déchiffrer lorsque mes efforts furent interrompus par la voix de notre ainé. Je redressais la tête dans sa direction. Sans lâcher l’objet que je manipulais avec toute la douceur dont mes fins doigts étaient dotés, je rejoignais le soldat. Interpelée par ce qu’il semblait avoir découvert derrière la porte. « Tu as trouvé quelque chose ? » lui demandais-je, à l’affût de toutes informations ou découvertes nous permettant d’en apprendre plus sur ceux qui avaient transformés précédemment ces lieux en vestibules de l’enfer. Telle était la raison de mon retour si prématuré dans ces ruines.