White foxes.

Le crissement est lourd, bruyant. Pas tant que ça, quand on y réfléchit bien, mais vu que le lieu est vide de toute forme de vie il est difficile de percevoir ce qui serait perçu inaperçu quelques décennies plus tôt de ce qui pouvait être "le bruit de trop" aujourd'hui. Miho avait pénétré les lieux après être tombée sur une porte cachée de branches et de feuilles, du métal que la végétation tentait de conquérir et que mademoiselle Kang avait libéré en quelques minutes. Il y avait bien une inscription sur la porte mais elle était presque effacé et elle avait été incapable de la déchiffrer. Un coup d'oeil sur sa montre... Encore une heure. Elle avait bien le temps de visiter un peu avant de rentrer au camp. Personne ne verrait la différence, personne ne saurait rien. Elle avait poussé la porte, qui s'était ouvert dans un bruit aiguë, et s'était engouffrée dans les ténèbres qu'elle brisa du faisceau de sa lampe torche. Ses pas la guidèrent dans un long couloir, qui déboucha lui-même sur une autre porte. Et c'est là que le crissement retentit. Derrière cette porte, une rame de métro éclairée par la lumière du jour en raison du plafond effondré. Miho éteignit sa lampe torche et la rangea dans son sac à dos, avant de prendre son fusil correctement entre ses mains. Il était un peu lourd pour la jeune femme mais elle visait bien, et lorsqu'elle faisait un headshot les bestioles ne se relevaient généralement pas. Sinon et bien... Elle n'avait plus qu'à courir.

Les sens aux aguets, elle s'avança sur le quai en promenant son regard autour d'elle. Parfois, elle aimerait avoir un appareil photo sous la main pour mieux pouvoir admirer certains paysages encore et encore, mais faute de mieux, elle devait se contenter de sa mémoire. Ce n'était pas plus mal, en soi, puisqu'elle pouvait garder jalousement les petites merveilles qu'elle arrivait encore à dénicher. Parfois des objets quelconques, souvent des endroits comme celui-ci. Perdus, abandonnés, complètement détruits, et symbole d'une civilisation disparue qui tend à se remettre debout, bien qu'avec beaucoup de difficulté. Le cerveau de Miho imprima les images que ses yeux voyait, puis elle se décida à avancer vers les wagons laissés à l'abandon sur les rails. L'ouïe concentrée sur ce qui l'entourait, elle poussa d'une main prudente l'une des porte métallique et attendit, sur le côté, le canon pointé vers l'intérieur du wagon. Rien ne bondit sur la rame de métro, elle s'autorisa donc à pénétrer à l'intérieur, visant tour à tour à gauche et à droite au cas où une bestiole quelconque ait été assez intelligente pour rester planquée jusqu'à ce que la "proie" rentre d'elle-même dans la gueule du loup, mais rien non plus. Miho s'avança entre les sièges poussiéreux, des images de petites filles lui revenant à l'esprit. Des souvenirs, vagues, brouillés, tellement flous qu'ils paraissaient irréels. Et pourtant, ils avaient bel et bien existé, tout ça n'était pas que le fruit de son imagination. Elle s'y serait laissée bercée si des bruits n'avaient pas capté son attention à l'extérieur des wagons. Il était temps de mettre fin à sa rêverie. Relevant son fusil à clous, elle approcha de la porte et s'y plaqua avant de jeter un coup d'oeil prudent vers l'extérieur, dans le plus grand des silences.

White foxes.

Ne prends jamais les galeries du métro lorsque tu es seule en mission ? Combien de fois me l’a-t-on répété ? Sans doute autant qu’étoiles brillaient dans le ciel nocturne. Cependant, non, je n’avais pas mis les pieds par ici juste pour prendre un raccourci sur le retour de mission. Ce fut la force des choses qui m’avait conduit ici, échappant à d’autres poursuivants, soit disant plus humains que les créatures habitants ces lieux. Paraissait-il car étrangement, pendant de longues minutes, je trouvais les parages bien calmes. Loin de me relâcher, je n’en soupçonnais qu’un plus grand danger et… force était de constater que je ne m’étais trompée lorsque je tombais nez à nez avec un scorpion géant radioactif. D’aussi vite que mes jambes me le permettaient, à travers les galeries souterraines je courrais. Course à en perdre à l’haleine, course pour la survie, l’obscurité je fendais. Par instant, la pointe de mes pieds butait. Mon équilibre je me bénissais alors m’empêchant de tomber, de continuer à tenter de m’échapper. Seule, je ne pouvais affronter un tel monstre. À la différence du dernier serpent croisé récemment, je n’envisageais présentement de parvenir à l’abattre ou le capturer malgré l’intérêt que son poison possédait également. Un jour, je trouverais quelques fous pour m’accompagner tenter de mettre la main sur un radscorpion à des fins scientifiques, mais vraisemblablement, ce n’était pas pour aujourd’hui. Je le savais que je ne pourrais pas traverser les galeries de métro sans ennui, j’avais juste espérer qu’il soit un peu moindre que celui-ci ! Mes foulées croissantes me menèrent jusqu’à un tunnel où une source de lumière semblait percer quelque peu la pénombre. Arrivais-je à une issue ? Je compris rapidement que non. Tout de moins, l’ascension jusqu’au plafond effondré semblait bien compliqué, surtout avec un radscorpion sur les talons. Alors, droit devant moi je regardais. Dans mon champ de vision, la forme d’un wagon s’était dessiné. Plus je me rapprochais et mieux je le distinguais jusqu’à entrapercevoir un visage humain par-delà la vitre de la porte d’accès. 


Sans ralentir ma course, d’un geste du bras, je vous signifiais de vous reculer, tandis que de l’autre je dégainais mon pistolet à énergie nucléaire. Oui, je connaissais ma force, ou plutôt mon absence de force et je n’avais pas vraiment le temps devant moi pour lutter avec une porte qui risquait fort de résister. Par précaution, j’anticipais et l’ouvrais d’un tir effectué une fois assez rapprochée pour être certaine de le manquer malgré mes piètres qualités de tireuses et le rythme de ma course. Objectif atteint, je sautais et me précipitais à l’intérieur du wagon. « Restez pas là ! » Par le bras, qui que vous soyez, je vous attrapais. À ma suite je vous entrainais avant que le dard de la queue de l’énorme scorpion ne s’abattent par-delà la porte d’accès au wagon. Brièvement, je me retournais. Sur la créature, un regard je jetais, les yeux grands ouverts. Respiration saccadée, ma poitrine soulevée au gré de ses inspirations, je déglutis. Je l’avais échappé bel mais nous étions loin d’être en sécurité. « Mon ami est un peu grincheux ! » trouvais-je tout de même le moyen de plaisanter à votre attention. « Nous ferions mieux de ne pas trainer dans les parages quand il est d’une telle humeur. » Dans la direction opposée, vers la pénombre des wagons de l’ancien métro désormais immobilisé je me tournais. Peut-être le scorpion n’avait-il pas réussi à franchir cette porte mais il risquerait fort de trouver brèche dans laquelle s’engouffrer, voire qu’il parviendrait à créer à l’aide de ses pinces. Une vitre restante déjà il brisa soudainement. À l’intérieur des wagons, nous étions autant à l’abri que prises au piège s’il venait à y pénétrer. À moins que nous soyons celles qui le piègerions.