Camille naquit un jour avant la veillée de la nouvelle année dans une famille modeste à Tôkyô au Japon. Enfin, « modeste », tout était relatif. La famille Nakajima était une famille réputée au Japon et humble bien avant que la troisième guerre n'éclate. Ils firent plus partie de ces gens fuyant pour survivre plutôt que de ceux combattant pour leur survie. Voilà peut-être pourquoi une grande partie de cette famille fut décimée sans qu'ils ne puissent rien y faire mais, ne l'avaient-ils pas mérités ? Ils n'étaient que des lâches.
Voilà dans quel genre de famille Camille naquit, lui, qui fut l'enfant le plus adorable qu'on ne puisse jamais connaître. Il grandit auprès de parents aimants mais qui passaient leur temps à se plaindre et à critiquer dès qu'il n'était pas dans les parages. Il était innocent et loin de savoir que le plus dur était à venir.
Aussi étonnant que cela puisse-t-il être, son père était psychologue et sa mère infirmière mais cela n'empêcha ce qui devait arriver lors des cinq ans de Camille. Sa mère décéda. On ne sut pourquoi exactement mais elle disparut aussi facilement que d'autres pouvaient disparaître de la planète. Cela fut un choc démesuré pour l'enfant qu'était Camille d'apprendre que sa mère n'était plus mais ce ne fut pas le plus dur à supporter pour lui. Autant cela le rendait-il triste, autant son père tomba dans la dépravation en apprenant que son épouse était morte et qu'en plus elle avait eu une relation avec quelqu'un d'autre avant de mourir.

« Papa, pourquoi est-ce que Maman n'est-elle plus là ? Pourquoi est-ce qu'elle est partie sans nous au ciel ?
- Mais tu vas la fermer ! »

Le coup partit sans qu'il ne puisse le voir. Son père venait de le gifler avec une force ahurissante, le faisant reculer avant qu'il ne tombe avec violence au sol. Sa main sur sa joue qui le brûlait, Camille se mit à pleurer sans savoir que cela empirerait les choses. Son père fut plus brutal avec lui et cela ne se limita pas à une fois. Il dut apprendre à cacher ses tristes sentiments, à cesser de pleurer et à endurer la douleur. Des cicatrices se formèrent sur son corps mais également sur son corps et à l'intérieur de son esprit... Fissuré.
Puis, lors de ses dix ans, la troisième grande guerre éclata. Une grande partie de sa famille fut décimée et, même s'il y restait encore des survivants, la seule personne avec qui il se retrouva malencontreusement coincé sous terre fut son père. Ces années dans cet abri avec son père et les survivants de la guerre ayant décidés de ne pas rester à l'extérieur furent les pires années de sa vie.
Heureusement que Camille ne resta pas un enfant. Il grandit et acquit de la volonté de ne pas se laisser faire. Il alla à l'encontre de son père et termina par contrer ses coups. Seulement, son mental était ébranlé et son père possédait les mots justes pour continuer à le battre sans qu'il ne puisse rien y faire. Camille n'était donc à l'abri de rien avec son père violent, et alcoolique – qu'il était devenu à la mort de sa femme -, et sa seule solution était de s'en aller dès qu'il en aurait l'occasion.
Il songea longtemps à partir vivre à l'extérieur même si on lui avait dit maintes fois à quel point c'était dangereux. Au final, il s'installa d'abord seul pour ne plus à avoir vivre le calvaire que son père avait pu lui faire vivre durant tant d'années. Il continua de lui rendre visite mais ne restait jamais longtemps pour éviter à ce que ça dégénère. Puis, après avoir fini ses études et un lourd apprentissage, il devint explorateur. Pourquoi spécialement explorateur ? Pour pouvoir sortir dehors et découvrir ce monde qu'on lui avait caché pendant tant d'années.
Le monde à l'extérieur était magnifique. C'était le chaos, ça l'était toujours. Il ne put réprimer un sourire et encore moins ne pas se sentir aussi excité. La première fois qu'il sortit fut lors de ses seize ans et non avant. Il fut bien évidemment accompagné d'un mentor pour qu'il puisse apprendre toutes les ficelles de cette caste. Il fut un disciple très studieux et sa formation se déroula pour le mieux. Ensuite, il suivit une formation pour devenir soigneur, pour pouvoir aider les personnes en difficultés et les ramener à l'abri pour qu'on puisse terminer de les soigner, voire de les opérer quand cela était nécessaire. Sauver des vies lui permettait peut-être de se rassurer mentalement à celle de sa vie qu'il avait pas pu sauver, à celle de son père qui était tombé dans les méandres de la dépravation.
Toutefois, les années défilèrent et ce fut au tour de son père de disparaître. Allez savoir mais il avait fini par disjoncter et se retrouver là où il n'avait pas une seule fois mis les pieds : à l'extérieur. Pas préparé et seul, il ne fit pas long feu. Ce fut Camille qui retrouva son corps au bout de quelques jours. À ce moment-là, il avait vingt-sept ans et il ne sut dire si cela le toucha ou le révulsa, lui qui avait toujours espéré lui faire payer toutes ses dettes quand il en aura l'occasion. En tout cas, après une disparation vint une rencontre.

« Bonjour Docteur, je suis Harada Izao. »

Izao. Il sut dès le premier regard posé sur lui qu'il y aurait une deuxième rencontre. Cependant, il n'avait pensé à ce qu'ils finiraient par sortir ensemble. Izao le lui avait demandé un jour alors qu'ils étaient partis en exploration tous les deux. Il l'avait regardé, perplexe, mais n'avait pas hésité une seule seconde à accepter. C'était une nouvelle histoire qui commençait et peut-être une nouvelle vie.